Cossmannia 

Géologie Néogènique du Cotentin : anciennes exploitations

Exploitation de Phosphates de Gourbesville et Orglandes (1890-1896)

 

 

 

Situation de l'Extraction

 

En 1879, G.Vasseur constate à l’occasion de la rectification du chemin vicinal allant du Presbytère de Gourbesville à Port Bréhay la présence sur plus de 600 m d’un conglomérat à ossements de Lamantins surmontant le calcaire lacustre Eocène, et recouvert lui-même de sables pliocènes à Nassa Prismatica. L’ensemble pourrait reposer, au moins vers Orglandes, sur le calcaire à Baculites puis sur l’Infra lias. La couche de phosphates est de couleur grise et a une épaisseur d'environ 0,60 mètres àGourbesville et 1 mètre à Orglandes. Elle est surmontée par un lit de sable argileux jaunâtre ou rougeâtre de moins de 1 mètre puis par un limon argileux brunâtre ou jaunâtre d’environ 2 mètres à Gourbesville et pouvant aller jusqu’à 6 mètres à Orglandes. Les gisements sont situés sur les communes de Orglandes et de Gourbesville, à une altitude variant de 17 à Gourbesville à 34 mètres à Orglandes :

-         Orglandes : le gisement est situé sur le plateau, à 600 mètres du château de Croslay, sur la route de Gourbesville à Orglandes. La carrière d’extraction a été rebouchée il y a une dizaine d’années par le propriétaire et aujourd’hui plus aucune trace n’est visible de ces exploitations.

-         Gourbesville : le gisement est situé immédiatement au-dessus de la ferme de la Godefrayerie, de part et d’autre du chemin menant à la ferme. Seule aujourd’hui la carrière dite de la vierge est encore bien visible, l’autre carrière située à l’ouest du chemin ayant été en partie comblée par la commune après avoir servi pendant plusieurs dizaines d’années comme décharge municipale.

 

Origine des Phosphates

 

L'origine probable de ces phosphates Pliocènes, qui ont fait l'objet d'une extraction intensive également à Brévands ( Manche ) et à Saint-Clément ( Calvados ), semble être fournie par un cordon de nodules et de débris d’ossements roulés, surtout des débris d’Halitherium, régnant à la base des sables pliocènes et issus d’un remaniement du miocène.

 

Origines de la mise en extraction 

 

En 1889, l’Ingénieur Merle, à qui on doit d’avoir appelé l’attention sur l’importance industrielle des phosphates de Picardie puis du Cotentin, entreprend une série d’explorations à Orglandes et Gourbesville. Ses découvertes attirent l’attention des paléontologues qui signalent très tôt la présence de ces couches à phosphates pliocènes ( 1891-a.de Lapparent,1891-A.Gaudry,1891- A.Bigot) et surtout la présence d’ossements remaniés du Miocène  ( cotes d’Halitherium, dent de bœuf,…).

 

Extraction

 

 

En 1890, Louis Dior, bien connu pour ses usines qui fabriquent des engrais chimiques à Granville, entreprend l’exploitation industrielle des couches à phosphates d’Orglandes. Il ouvre alors une première carrière qui sera exploitée durant plusieurs années à flan de coteau sur le plateau. En descendant le coteau, la couche de limon s’aminçit et la couche à phosphate est plus accessible à environ 2 mètres de profondeur. Cependant la faible épaisseur exploitable entraîne rapidement l’abandon de l’exploitation. En 1893, L.Dior lance alors l’exploitation des phosphates de Gourbesville dans deux carrières situées au-dessus de la Godefrayerie. Les bâtiments de cette ferme sont d’ailleurs les restes de l’ancienne installation et des entrepôts qui servaient autrefois au conditionnement des phosphates.  Le transport se fait à l’aide de charrettes jusqu’à la gare de Fresville où le phosphate est expédié. Nous n’avons pas retrouvé de traces d’un quelconque traitement des phosphates sur place comme à Brévands. Le seul élément en notre possession est le témoignage de C.Pareyn qui cite le cas de « L.Boutillier, collectionneur qui achetait les échantillons de sa collection lorsque les terrassements et criblages de Gourbesville fonctionnaient à plein ». Etant donné l’aspect géographique des lieux, il semble effectivement que l’exploitation consistait à creuser dans la couche à phosphate qui partaient sous le coteau, puis probablement à tamiser sur place afin de récupérer les nodules de phosphate, avant de rejeter les déblais au fur et à mesure vers le bas du coteau. Les fossiles récupérés alors par les ouvriers étaient vendus à des rabatteurs qui revendaient alors ceux-ci aux collectionneurs et le Phosphate était probablement ensaché avant expédition vers une usine de traitement.

 

  1896 : la fin d'une courte épopée

En 1896, après seulement 7 années d’exploitation, les exploitations d’Orglandes et de Gourbesville sont abandonnées. Les carrières utilisaient une couche fort mince et peu riche qui allait s’enfouissant à une profondeur croissante sous le coteau, et elles étaient dans l’impossibilité de rivaliser avec les grandes entreprises du Nord de la France, et surtout avec les phosphates d’Algérie ou de Tunisie, d’une richesse bien supérieure. Les seuls vestiges qui subsistent aujourd'hui : les quelques bâtiments de la Godefrayerie et les ossements fossiles  entreposés dans les greniers du Musée du Parc Liais. 

Ossements de Gourbesville( collection Musée E.Liais)

Cotes d’Halitherium de Gourbesville ( collection Musée E.Liais )

 

    

 

samedi 26 novembre 2005